Depuis deux ans déjà, tous les établissements HoReCa aux Pays-Bas doivent servir boissons et nourriture consommées sur place dans des emballages réutilisables. Pourtant, depuis l’été 2024, McDonald’s Pays-Bas enfreint la loi en proposant dans ses restaurants des gobelets en carton à usage unique recouverts d’un revêtement plastique. Ainsi, la plus grande chaîne de restauration rapide du pays n’est pas seulement en infraction et gaspille des ressources, mais elle fait même payer un supplément aux consommateurs en appliquant une surcharge sur ces gobelets à usage unique.
McDonald’s se fait de l’argent supplémentaire grâce à ses clients tout en enfreignant la loi
Tous les cafés, restaurants et hôtels qui servent des boissons et des aliments à consommer sur place doivent les proposer dans des emballages réutilisables[1]. Cette loi est en vigueur aux Pays-Bas depuis janvier 2024, en application de la réglementation européenne. Son objectif est de réduire l’utilisation d’emballages à usage unique contenant du plastique. Depuis août 2024, McDonald’s enfreint cette loi[2] en réintroduisant des gobelets à usage unique en papier comportant un film plastique pour la consommation sur place (pour les boissons et leurs McFlurry). Cela à côté des emballages réutilisables. Les restaurants facturent à leurs clients 0,15 € par gobelet à usage unique, alors que cette « surchage plastique à usage unique » ne doit être facturé que pour les emballages à emporter. La plus grande chaîne de restauration rapide des Pays-Bas ne respecte donc pas les règles et gagne de l’argent supplémentaire sur le dos de ses clients en créant un revenu supplémentaire sur des emballages à usage unique interdits.
Le leader du marché McDonald’s peut-il ignorer les règles et en tirer profit ? Ses concurrents, qu’il s’agisse de grandes chaînes ou de petits entrepreneurs, qui respectent les règles et contribuent ainsi à un système d’emballage circulaire, se retrouvent dans une situation de concurrence déloyale. La Fair Resource Foundation a déposé une demande d’application de la loi auprès du service d’inspection (ILT) le 24 novembre.
McDonald’s conduit de nouveau le réemploi à l’échec
Dans son rapport d’impact 2024–2025 néerlandais (p. 15), publié en octobre 2025, le groupe écrit qu’il croit « non pas exclusivement aux emballages réutilisables, mais à un mélange de solutions ».
Cela semble nuancé, mais en coulisses, McDonald’s mène une campagne de lobbying active contre les emballages réutilisables. Dans l’ Union Européenne, l’entreprise le fait via la campagne très controversée No Silver Bullet–,, et aux Pays-Bas, à travers des entretiens avec, entre autres, l’ancien secrétaire d’État Chris Jansen, Représentant spécial du gouvernement pour l’économie circulaire Steven van Eijck et divers membres du Parlement. L’entreprise influence également l’opinion publique en présentant le réemploi comme « mauvais pour l’environnement » dans des interviews et des articles (sponsorisés) publiés dans les médias nationaux et internationaux (2023, 2024, 2025). Mais plus important encore : McDonald’s Pays-Bas sabote son propre système de réemploi.
Le rapport d’impact affirme que leurs gobelets réutilisables ne sont réutilisés que 3,3 fois dans les restaurants néerlandais. Ce chiffre est bien inférieur à celui des systèmes de réemploi bien conçus et efficaces. Leurs collègues de McDonald’s France montrent qu’il est possible de faire mieux, avec une moyenne de 33,9 réutilisations pour la consommation sur place.
Il n’est pas surprenant que le réemploi ne fonctionne pas dans les restaurants néerlandais :
- Processus de commande peu clair
- Pour manger sur place, vous pouvez choisir soit un gobelet réutilisable, soit un gobelet à usage unique (ce qui est interdit par la loi) portant la mention « à emporter » (photo 4) ;
- Les premiers choix sur la borne de commande sont les gobelets à usage unique ;
- Les gobelets réutilisables pour les repas sur place ne sont pas consignés, ce qui n’incite pas les clients qui souhaitent finir leur boisson plus tard à rapporter leur gobelet (photo 1) ;
- Pour une partie des gobelets réutilisables destinés à la consommation sur place, aucune information n’est fournie lors du processus de commande : il n’est pas clair dans quel type de gobelet votre commande sera servie (et ce que vous devez en faire). Par exemple : pour le Coca Cola Regular, il est indiqué « gobelet réutilisable », tandis que pour le Coca Cola Zero, aucune information n’est fournie (alors qu’il est également servi dans un gobelet réutilisable) (photo 5);
- Les gobelets réutilisables et à usage unique se ressemblent beaucoup (photo 1), mais leur processus de retour est différent.
- Gobelet à usage unique : dans la poubelle ;
- Réutilisables sur place : à rapporter au point de collecte (proche des poubelles) ;
- Réutilisables pour take-away : doivent être rapportés (pas d’information sur où) pour récupérer la consigne ;
- Gobelets customisés avec le logo de McDo pouvant être considérées comme des objets de collection (photo 1) ;
- Couvercle en papier à usage unique identique sur tous les gobelets (à usage unique et réutilisables) (photo 2) ;
- Aucune incitation, telle qu’une consigne, à rapporter les emballages réutilisables pour consommation sur place (photo 1 – voir également l’étude du Zwerfinator) ;
- Aucune communication dans les restaurants sur les avantages du réemploi : peu ou pas d’actions sont menées pour inciter les clients à choisir la version réutilisable ;
- Pour les McFlurry, alors que nous avions commandé à la fois des emballages à usage unique et réutilisables, nous n’avons reçu que des emballages à usage unique (photo 3).
- Concernant les emballages réutilisables pour take-away : il n’est pas clair où et comment les consommateurs peuvent retourner leurs emballages, par exemple s’ils peuvent récupérer leur consigne et s’ils doivent pour cela refaire la queue parmi les autres clients (photo 6).
Photo 1 – Gobelets de taille moyenne. De gauche à droite : à usage unique au restaurant, réutilisables sur place, réutilisables pour take-away.
Photo 2 – Couvercle en carton à usage unique sur des emballages à usage unique (en haut) et réutilisables (en bas) destinés à la consommation sur place.
Photo 4 – processus de commande sur place : chaque boisson est présentée deux fois, dans un emballage à usage unique (1re option) ou dans un emballage réutilisable (2e option).
Photo 5 – Processus de commande sur place dans certains restaurants : aucune mention sur les emballages réutilisables
Toutes ces caractéristiques sont en contradiction avec les bonnes pratiques de la feuille de route du réemploi élaborée par Mission Reuse à la demande du ministère néerlandais des Infrastructures et de la Gestion de l’eau (IenW). Bien que certaines parties du système aient été bien pensées par McDonald’s (remboursement rapide de la consigne à la caisse et points de collecte assez clairs), cela ne suffit pas pour atteindre les taux de retour souhaités. McDonald’s communique activement que la réutilisation ne fonctionne pas. Mais un système défaillant ne peut être utilisé pour évaluer les performances environnementales et économiques du réemploi.
Hypothèses erronées et affirmations infondées : la vérité sur les emballages à usage unique en papier
Pendant ce temps, McDonald’s continue de tromper les consommateurs sur le caractère « écologique » de ses emballages en papier par rapport aux alternatives réutilisables. Remplacer les emballages en plastique à usage unique (ou réutilisable) par des emballages à usage unique en papier (recouvert d’un revêtement plastique) ignore les énormes problèmes causés par la demande croissante en papier. Chaque année, 3 milliards d’arbres sont abattus, les forêts d’Estonie et de Finlande sont devenues des émetteurs nets de CO₂, et les incendies de forêt et la perte de biodiversité sont en augmentation (Environmental Paper Network).
Sans parler du transport, de la consommation d’énergie et d’eau : des études montrent que le cycle infini d’extraction des ressources, de la production, de l’utilisation et du traitement des emballages à usage unique a un impact environnemental plus important que celui de systèmes de réemploi bien conçus (Rethink Plastic Alliance, 2021 ; Eunomia, 2023).
Enfreindre les règles et mettre en péril le secteur du réemploi
Depuis un an et demi, McDonald’s Pays-Bas vend, en violation de la loi, des boissons à consommer sur place dans des emballages à usage unique contenant du plastique. Le géant de la restauration rapide, plus important que KFC et Burger King réunis (ce dernier démontre d’ailleurs que le réemploi fonctionne grâce à des systèmes adaptés aux consommateurs), ne respecte donc pas la réglementation néerlandaise en matière de plastique à usage unique. C’est pourquoi Fair Resource Foundation a déposé une demande d’application de la loi (Handhaving Verzoek) auprès de l’Inspection de l’environnement et des transports (ILT).
En outre, en concevant délibérément un système de réemploi défaillant, puis en rejetant la faute sur le concept même du réemploi, la chaîne menace l’émergence des entreprises réellement circulaires néerlandaises. McDonald’s sape les efforts d’entrepreneurs innovants et avant-gardistes qui œuvrent pour un monde plus propre et moins coûteux pour la société.
Le réemploi, c’est l’avenir. l’avenir, c’est maintenant
Ce n’est pas sans raison que le gouvernement néerlandais a fait du réemploi une norme : il souhaite réduire de 40 % l’utilisation des gobelets et de barquettes à usage unique en plastique d’ici 2026 et mettre fin aux déchets sauvages. Cet objectif ne peut être atteint qu’en supprimant progressivement les emballages en plastique à usage unique ou en introduisant des systèmes de réemploi. McDonald’s préconise lui-même « une approche fondée sur des données pratiques concernant l’impact environnemental réel des emballages réutilisables » (Rapport d’impact 2024-2025, p. 15).
Les résultats sont clairs : les systèmes de réemploi optimisés sont plus performants que les emballages à usage unique, tant en termes d’impact environnemental que de rentabilité. Le réemploi obligatoire est donc une solution efficace et fondée sur des données pour lutter contre la société de l’usage unique que nous avons créée ces dernières décénnies. Burger King, le plus grand concurrent de McDonald’s, montre d’ailleurs que le réemploi fonctionne – y compris dans la restauration rapide – grâce à des systèmes adaptés aux consommateurs. Dans d’autres secteurs, on trouve également de nombreux exemples positifs aux Pays-Bas et à l’étranger. Citons notamment les parcs d’attractions (Disneyland Paris, Walibi, Diergaarde Blijdorp, Toverland), clubs sportifs (v.v. Oudehaske, v.v. Oegstgeest) et événements municipaux (Leids Ontzet, Gentse Feesten).
À McDonald’s et au gouvernement : prenez les devants
McDonald’s Pays-Bas a clairement fait savoir qu’il n’était « pas satisfait » des nouvelles règles relatives aux emballages réutilisables et qu’il préférait les emballages en papier recouverts d’une couche de plastique. En influençant la législation, en orientant l’opinion publique et en laissant échouer son propre système de réutilisation aux Pays-Bas, McDonald’s tente d’obtenir gain de cause. Dans sa volonté de maintenir le statu quo des emballages à usage unique, l’entreprise n’hésite même pas à enfreindre la loi et à gagner de l’argent supplémentaire sur le dos de ses clients.
Nous appelons Thierry Aartsen, secrétaire d’État à l’Infrastructure et à la Gestion de l’eau, à veiller à ce que la législation soit uniforme pour tous les secteurs et à ce qu’elle soit appliquée. Cela permettra de passer réellement de l’usage unique au réutilisable. Comme l’a indiqué le ministre lui-même lors du dernier débat de la commission sur l’économie circulaire : « il serait dommage » de revenir aux « gobelets en papier ». À l’heure actuelle, il est essentiel de ne pas revenir sur la législation existante en matière de réutilisation, mais au contraire de la renforcer (voir nos suggestions précédentes à ce sujet).
Les entreprises qui « ont investi et veulent aller de l’avant », comme les a qualifiées Aartsen, ont besoin de règles claires et cohérentes pour pouvoir mettre en place des systèmes de réutilisation efficaces. En outre, l’application de la loi est indispensable et peut faire une grande différence lorsque la chaîne de restauration rapide la plus influente, qui enfreint la loi, est appelée à rendre des comptes.
Enfin, nous appelons McDonald’s à prendre ses responsabilités et à respecter la loi, à cesser de « faire de la résistance » et à ne plus faire payer à ses clients des emballages à usage unique interdits. En tant que leader du marché, McDonald’s détermine l’orientation du marché. L’entreprise aime mettre à profit sa « taille pour avoir un impact positif ». ». Nous ne pouvons que nous en réjouir, dans la perspective d’un passage aux emballages réutilisables.
Notes
[1] À moins que du rPET recyclé de haute qualité ne soit utilisé et recyclé à nouveau (pensez aux gobelets souples utilisés lors des festivals).↑
[2] Nous avons visité 12 restaurants pour analyser leur système de réemploi: Arnhem Station, Beestenmarkt (Leiden), Coolsingel (Rotterdam), Donkersteeg (Leiden), Hazeldonk-Oost (Hazeldonk), Hoogstraat (Rotterdam), Lange Vie (Utrecht), Oudegracht (Utrecht), Persant Snoepweg (Leiderdorp), Rhijnhofweg (Oegstgeest), Rooseveltstraat (Leiden), Turfmarkt 95 (La Haye)↑
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