Rédigé par Chloé Schwizgebel, Fair Resource Foundation et Nina Maat, Bond Beter Leefmilieu
L’ambition d’une Flandre sans déchets sauvages grâce à un système de consigne ambitieux a-t-elle vraiment été fixée, ou 2023 sera-t-elle une année perdue ?
2023 : l’occasion de tester un système « numérique”
Malgré cette décision, il est trop tôt pour crier victoire. En effet, le choix de la ministre Demir d’opter pour la consigne ne porte pas forcément pour le système existant et connu, dans lequel les consommateurs rapportent leurs bouteilles vides dans les magasins et récupèrent immédiatement leur argent. Cela bien que ce système fonctionne déjà dans d’autres pays européens. D’ailleurs, une enquête réalisée par Test-Achats en 2021 a montré que plus de 88 % de la population belge accepte de rapporter les emballages aux points de collecte tels que les supermarchés.
La décision prévoit simplement que toutes les boîtes de conserve et les bouteilles en plastique seront consignées d’ici 2025 et que l’industrie disposera d’une année pour tester un nouveau système. Ce nouveau système demandera aux consommateurs de scanner un code QR sur l’emballage et le sac bleu avant de jeter leurs déchets.
Numérique n’est pas forcément synonyme d’innovation
Ne nous y méprenons pas : nous soutenons l’innovation. Mais rendre quelque chose qui existe “numérique” n’est pas forcément synonyme d’innovation. L’étude préliminaire commandée par Fost Plus a déjà mis en avant de nombreuses questions concernant la vie privée, la fraude et l’accessibilité du système de consigne numérique. En effet, tous les citoyens n’ont pas accès aux applications numériques ou même à un compte en banque. Ensuite, il s’agit de savoir qui supportera les coûts et les contraintes supplémentaires. Avec une consigne numérique, les coûts supplémentaires liés à l’impression des QR-codes sur les canettes pourraient par exemple être répercutés sur les consommateurs. En outre, il n’est pas certain que tous les producteurs puissent se mettre à niveau du nouveau système à temps, compte tenu notamment des nombreuses questions de faisabilité. Enfin, la question clé est la suivante : ce système réduira-t-il les déchets sauvages ? Il semble par exemple que les citoyens pourraient toujours laisser leurs emballages dans les déchets sauvages après les avoir scannés. Enfin, on ne sait pas si ce système contribuera à une économie réellement plus circulaire pour les emballages, en améliorant vraiment la collecte sélective ou en facilitant la mise en place d’un système pour les emballages réutilisables.
Ces faiblesses du système numérique ont d’ailleurs convaincu le Pays de Galles d’opter pour un système de consigne classique après des tests pilotes similaires sur cette consigne numérique.
Les conditions essentielles d’un bon système
Alors que le système de consigne classique a déjà fait ses preuves, le système numérique n’a plus que six mois pour faire ses preuves en Belgique. Son succès ou son échec dépendra de quelques éléments déterminants. Tout d’abord, pour qu’un système de consigne soit efficace, il doit réduire les déchets sauvages, et donc les coûts associés pour les citoyens et l’environnement. Deuxièmement, il doit être accessible à tous, indépendamment de l’âge, de la santé, de la mobilité ou de la capacité financière, avec ou sans internet, smartphone ou compte en banque. Troisièmement, il ne doit pas être 100% fiable en ce qui concerne la fraude et le respect des données privées.
La phase de pilotes de cette consigne numérique en Flandre ressemble davantage à une ultime tentative du secteur de l’emballage de se soustraire à ses responsabilités et donc à une perte de temps qui aurait pu être mieux investie dans la réduction des déchets sauvages. Une véritable innovation, par exemple, miserait sur l’éco-conception et la circularité des produits, en pensant déjà au réemploi en amont de la chaîne de production.
La ministre wallonne de l’environnement, Céline Tellier, adopte donc une approche différente de celle de la Flandre. Elle aussi souhaite mettre en place la consigne en 2025 et a donc elle-même commandité une étude préparatoire sur la meilleure option. À cette fin, l’étude se fait de manière concertée avec les autres régions et les pays voisins, afin de garantir l’uniformité et l’accessibilité du système pour les citoyens.
Tout au long de ces projets pilotes, nous continuerons donc à insister sur la transparence, sur une planification claire avec des échéances précises et sur l’implication des différentes parties prenantes. De cette manière, nous atteindrons l’objectif premier de la consigne : moins de déchets sauvages dans notre environnement grâce à un système de consigne efficace et accessible en 2025.