Combien de CO2 la consigne permet-elle d’économiser ?

par Rob Buurman | 5 février 2019

Une consigne est un système dans lequel une somme est versée lors de l’achat d’un produit (en général un emballage de boisson). Le montant total est remboursé lorsque le produit est retourné.

Aux Pays-Bas, il existe une consigne sur les bouteilles en verre réutilisables et sur les bouteilles en plastique . En Belgique, il existe une consigne sur les bouteilles en verre réutilisables. Mais il n’y a pas encore de consigne sur toutes les bouteilles en plastique ou encore sur les canettes.

Quel est le lien entre la consigne et les émissions de CO2 ?

Tout ce que nous faisons consomme de l’énergie, y compris la production, la consommation et le traitement des emballages de boissons. Ce qui compte, c’est la manière dont nous mettons en place ce système. Le choix des matériaux d’emballage des boissons, le transport de ces emballages jusqu’au magasin, la manière dont nous collectons les déchets, tout cela détermine l’empreinte carbone des emballages de boissons.

La consigne est une méthode permettant de réduire l’empreinte carbone des emballages de boissons. En prenant tout en compte, de la production du plastique au recyclage ou à la combustion de la bouteille, la consigne permet de réaliser des économies de CO2 par rapport aux systèmes de collecte actuels. Grâce à la consigne, davantage de plastiques sont correctement recyclés, moins sont incinérés et moins de pétrole est nécessaire pour produire de nouveaux plastiques.

Nous calculons ci-dessous la différence d’émissions de CO2 entre les systèmes de consigne et les systèmes de collecte actuels aux Pays-Bas et en Belgique.

Pays-Bas

Bouteilles en plastique

En 2017, à la demande du ministère des infrastructures et de la gestion des eaux (ILT), CE Delft a réalisé une sur les coûts et les effets de la consigne. L’étude a également calculé les économies de CO2 permises par la consigne sur les petites bouteilles en plastique et les canettes.

Le calcul du CO2 dans l’étude sur la consigne s’appuie largement sur une étude réalisée en 2011 par CE Delft qui a cartographié les différences environnementales pour différents systèmes de collecte. Il en ressort que la quantité de recyclat produite et utilisée dans les nouveaux produits est le facteur le plus déterminant. L’impact du transport est, en comparaison, limitée.

L’étude sur la consigne estime qu’actuellement 58% des petites bouteilles en plastique sont effectivement recyclées. Si cette proportion est portée à 90 % avec la consigne, il en résulterait une économie annuelle de CO2 de 20 ktonnes pour les bouteilles en plastique.

Canettes

Pour les canettes, une distinction est faite entre les canettes en acier et les canettes en aluminium. L’étude estime que la différence en terme d’empreinte est limitée pour les canettes en acier, car l’énergie est en grande partie récupérable dans les incinérateurs. En revanche, les pertes sont plus importantes pour les canettes en aluminium. Pour ces dernières, l’étude aboutit actuellement à un taux de recyclage de 62%. Avec un taux de retour de 90%, selon l’étude, 96% des canettes en aluminium sont finalement recyclées. Il en résulte une économie de CO2 de 34 ktonnes.

L’extension de la consigne aux bouteilles et aux canettes en plastique, avec une collecte hypothétique de 90 %, entraînerait donc une réduction annuelle de 54 ktonnes d’émissions de CO2 aux Pays-Bas.

Nous faisons deux commentaires sur ces chiffres. Tout d’abord, le taux de recyclage actuel des bouteilles en plastique est inférieur au taux de 58 % utilisé par CE Delft. Ainsi, un taux de retour de 90 % grâce à la consigne constituerait une amélioration encore plus importante, et permettrait de réduire encore plus les émissions de CO2.

La méthode de calcul actuelle inclut également l’humidité et les saletés attachées dans le poids des bouteilles en plastique collectées. Cela conduit à une surestimation du recyclage actuel, et donc à une sous-estimation des avantages environnementaux de la consigne. En effet, selon les analyses de tri effectuées par Eureco à la demande du Rijkswaterstaat, il apparaît que 41,8 % du poids des bouteilles en plastique est en réalité constitué d’humidité et de saleté. On peut s’attendre à ce que les bouteilles en plastique comptabilisées comme « recyclées » contiennent également une proportion similaire d’humidité et de saleté, ce qui rend le taux de recyclage réel des petites bouteilles en plastique nettement inférieur à 58%. Il se situe plutôt entre 30 et 40 %. Le gain réel de CO2 résultant de la collecte de 90 % par la consigne sera donc sensiblement plus élevé que celui calculé précédemment.

 

Flandre

Bouteilles en plastique 

En 2015, l’agence officielle flamande des déchets OVAM a réalisé une analyse d’impact sur l’introduction de la consigne sur les emballages de boissons à usage unique. Cette analyse n’a pas calculé les avantages en termes de CO2 d’un système de consigne.

L’étude néerlandaise suggère que l’utilisation de matériaux recyclés est le facteur le plus important pour déterminer le gain de CO2. Selon l’étude néerlandaise, le recyclage supplémentaire de 7,6 ktonnes de PET entraîne un gain de CO2 de 34 ktonnes. Cela représente une économie de 4,47 ktonnes de CO2 par ktonne de recyclage supplémentaire de PET. Pour l’aluminium, l’étude suppose une économie de 7 ktonnes de CO2 pour chaque ktonne de recyclage supplémentaire.

Pour appliquer les chiffres néerlandais à la situation flamande, il serait nécessaire de déterminer dans quelle proportion le recyclage augmenterait en Belgique grâce à la consigne sur les bouteilles en plastique et les canettes. Nous faisons le calcul ci-dessous.

Selon une étude réalisée par Recover, la moitié des bouteilles en PET présentes sur le marché flamand sont recyclées (selon les chiffres de Fost Plus, ce chiffre est de 87,7 %, mais leur méthode de calcul conduit à des surestimations). En Flandre, 32 kt de PET sont utilisées chaque année pour l’emballage des boissons. Ainsi, si le recyclage passe de 50 % à 90 %, 12,8 ktonnes de plastique supplémentaires sont recyclées. En supposant que l’économie néerlandaise de CO2 soit de 4,47 ktonne par ktonne de recyclage de PET, cela représenterait une économie de 57,2 ktonne de CO2 dans la production de bouteilles en plastique en Flandre.

 

Canettes

L’étude sur la consigne de l’OVAM en Flandre indique que 4 966 ktonnes de canettes en aluminium sont mises sur le marché flamand chaque année, dont 69,2% sont collectées séparément et recyclées, selon l’étude. Cela donne 3,436 ktonnes.

Il reste donc 1,530 ktonne d’aluminium. Si nous supposons que cet aluminium va à l’incinérateur, une partie est récupérée dans les incinérateurs. L’efficacité de ce système est estimée à 62% dans l’étude sur le gisement néerlandais. L’étude Recover cite les recherches de HJ P Claassens, qui a calculé une efficacité du recyclage de l’aluminium à partir des incinérateurs de 32 %. En supposant une efficacité de 32 à 62%, cela laisse 0,489 à 0,948 ktonne récupérée.

Un total de 3,925 à 4,385 ktonnes d’aluminium provenant de canettes est ainsi recyclé en Flandre avec le système actuel.

Un système de consigne avec 90 % de collecte sélective, associé à la récupération de l’aluminium dans les incinérateurs (pour les 10 % de canettes restantes), permettrait un recyclage total de 93,2 à 96,2 %. Cela se traduirait par le recyclage de 4,589 à 4,777 ktonnes d’aluminium. Par rapport à la situation actuelle, cela signifie un recyclage supplémentaire de 0,392 à 0,663 ktonnes. En supposant une économie de 7 ktonnes de CO2 par ktonne supplémentaire de recyclage de l’aluminium, on obtient une réduction de 2,7 à 4,6 ktonnes de CO2 avec les consignes sur les canettes.

L’extension de la consigne aux bouteilles et aux canettes en plastique, dans l’hypothèse d’une collecte de 90 %, entraînerait donc une réduction annuelle de 59,9 à 61,8 ktonnes d’émissions de CO2 en Flandre.

La consigne sur les bouteilles en plastique réduiraient les émissions de CO2 d’environ 59,9 à 61,8 ktonnes de CO2 en Flandre (en supposant une collecte sélective de 90 %). C’est plus qu’aux Pays-Bas (54 ktonnes de CO2). Il y a trois raisons principales à cela. Tout d’abord, les Pays-Bas possèdent déjà une consigne sur les grandes bouteilles en plastique, qui sont donc déjà bien collectées et recyclées. Deuxièmement, en Flandre, une large part des boissons consommées sont emballées dans du plastique. Troisièmement, nous utilisons le taux de recyclage officiel des petites bouteilles en plastique, qui est surestimé dans le calcul pour les Pays-Bas, alors que Recover a fait une estimation réaliste du recyclage des bouteilles en plastique pour la Flandre.

La consigne sur les bouteilles et les canettes en plastique contribue à réduire l’empreinte carbone aux Pays-Bas et en Flandre d’environ 115 ktonnes. La plantation d’arbres est une recette courante pour compenser le CO2. Un arbre moyen élimine environ 20 kg de CO2 de l’atmosphère chaque année. Cela signifie que les gains en CO2 provenant de la consigne en Flandre et aux Pays-Bas en un an est équivalent à la quantité de CO2 que 5,8 millions d’arbres retirent de l’atmosphère en un an.

 

Impact sur le climat de l’industrie des boissons non alcoolisées et de l’eau

Pour une canette de Coca-Cola ou une bouteille Spa, l’emballage est responsable d’une part importante et parfois même de la plus grande partie de l’empreinte carbone.

Chez Spadel Group, les emballages et les ingrédients représentent ensemble 55 % de l’empreinte carbone totale, selon leur propre rapport. La production (20%) et la logistique (22%) pèsent moins lourd que les bouteilles elles-mêmes. De plus en plus de producteurs réalisent qu’ils doivent devenir climatiquement neutres. L’un des meilleurs moyens d’y parvenir est d’utiliser des matériaux recyclés.

Remplacer le PET vierge par du PET recyclé (rPET) peut réduire considérablement l’empreinte carbone globale des emballages. Selon le jeu de données Ecoinvent (v3.4 pour IPCC 2013 GWP 100a), la contribution du rPET est de 0,472 eq CO2/kg et celle du PET vierge est de 2,92 eq CO2/kg. La production de plastique PET vierge neuf entraîne des émissions de CO2 plus de cinq fois supérieures à celles produites par l’utilisation de PET recyclé. Cela signifie qu’une bouteille en plastique composée à 100 % de matériaux recyclés a une empreinte climatique inférieure de 80 % à celle d’une bouteille en PET vierge (le gain exact peut varier en fonction des conditions locales).

La consigne aide les producteurs de deux manières. Tout d’abord, elle permet de collecter davantage de matériaux en vue de leur réutilisation. Ainsi, la proportion de matériaux recyclés dans une bouteille peut être augmentée. Deuxièmement, la consigne garantit un flux de PET recyclé plus propre. Ceux-ci peuvent être utilisés directement pour de nouvelles bouteilles. Le PET collecté aux Pays-Bas avec « Plastic Heroes » et en Belgique avec le sac bleu est davantage contaminé. Cela rend le PET de Plastic Heroes et le PET de sac bleu plus difficile à utiliser dans les nouvelles bouteilles en PET.

Coût-bénéfice Consigne et climat

L’étude de CE Delft sur la consigne néerlandaise n’a calculé que les coûts de l’extension du système de consigne actuel aux petites bouteilles en plastique et aux canettes. Par conséquent, il ne donne pas une bonne image des coûts totaux du système de consigne.

L’étude flamande sur la consigne réalisée par l’OVAM a calculé les coûts totaux et estime que les coûts pour les entreprises s’élèvent à 36 millions d’euros alors que les recettes sont estimées à 78 millions (tableau 3, scénario 5). La plupart de ces recettes sont constituées des bouteilles non retournées et de reçus non utilisés. Si nous excluons ces revenus, nous pouvons dire que le coût total du système est de 21 millions d’euros.

La consigne entraîne simultanément une réduction des coûts du système actuel de collecte des emballages, d’une valeur de 9,3 millions d’euros (tableau 5), mais aussi une réduction des revenus des matériaux via la collecte des sacs bleus, d’une valeur de 12,8 millions d’euros.

Enfin, l’étude de l’OVAM estime à 20,1 millions d’euros les économies annuelles réalisées sur le nettoyage et la prévention des déchets sauvages (tableau 3). Sur la base du travail d’étude de l’OVAM, l’introduction de la consigne sur les bouteilles en plastique et les canettes coûtera au total environ 3,5 millions d’euros par an, selon le travail d’étude de l’OVAM.

Mais pour déterminer le véritable coût total, il est nécessaire d’examiner la société dans son ensemble. Un étudiant de l’université de Wageningen a calculé, pour Recycling Netwerk, que l’industrie flamande de l’élevage perdait chaque année 4,5 à 6,8 millions d’euros en raison du coût des déchets sauvages, les bouteilles et surtout les canettes y étant pour beaucoup. Lors de la tonte des champs, des morceaux de canettes jetées ou d’autres déchets se retrouvent parfois dans l’alimentation du bétail. Ces morceaux provoquent des blessures dans l’estomac des bovins, ce qui entraîne la mort de 2 051 à 2 474 vaches chaque année. Avec une consigne, beaucoup moins de canettes finissent sur le bord de la route. Ce coût diminuerait donc.

Selon un rapport de Recover et Interafval, le coût flamand des déchets d’emballage est de l’ordre de 1 milliard d’euros. Les bouteilles et les canettes représentent jusqu’à 40 % du volume total des déchets sauvages et sont, dans une large mesure, les emballages les plus importants dans les déchets sauvages. Il donne une indication des gains sociaux importants qui peuvent être réalisés lorsque des consignes sur les bouteilles et les canettes sont introduites.

D’un point de vue sociétal, la consigne représente incontestablement une économie directe de coûts, qui se traduit également par des gains de CO2. En comparaison, le « Environmental Pricing Handbook 2017 » de CE Delft rapporte qu’en 2015, un coût du CO2 de 48 euros aurait été approprié pour atteindre les objectifs climatiques. Ce prix passe à 80 euros en 2030 et à 160 euros en 2050. De ce point de vue, la consigne constitue donc un moyen exceptionnellement rentable de réduire l’empreinte carbone.

 

Résumé

La consigne contribue à réduire les émissions de CO2, ce qui rapporte de l’argent. Par rapport aux émissions totales de CO2 de tous les secteurs aux Pays-Bas et en Belgique (transport, énergie, industrie), la contribution reste néanmoins relativement modeste. Les gains les plus importants devront provenir de l’abandon des combustibles fossiles pour notre approvisionnement énergétique et nos transports.

Mais il est certain que la contribution de la consigne n’est pas négligeable. Ce système s’inscrit donc dans l’ensemble des mesures climatiques visant à lutter contre les différentes sources de CO2.

La consigne sur les bouteilles et les canettes en plastique contribue à réduire l’empreinte de CO2 aux Pays-Bas et en Flandre d’environ 115 ktonnes. Cela signifie que le bénéfice environnemental de la consigne en un an est équivalent à la quantité de CO2 que 5,8 millions d’arbres retirent de l’atmosphère en un an.

L’avantage de la consigne en tant que mesure climatique est qu’elle peut être introduite rapidement et facilement par une décision politique et qu’elle bénéficie d’un large soutien auprès de 80% de la population néerlandaise et flamande. En ce sens, il s’agit d’un gain rapide et d’un fruit à portée de main pour les décideurs politiques qui souhaitent agir dès à présent avec des mesures climatiques concrètes.

Enfin, outre un effet positif pour le climat, la consigne présente des avantages très importants pour le cadre de vie, le bien-être des animaux et la lutte contre la soupe de plastique.

Effet de la consigne sur… Bouteilles plastique Canettes Bouteilles plastique + canettes (réduction en kton CO2)
Pays-Bas 20 34 54
Flandre 57,2 2,7 à 4,6 59,9 à 61,8
Total 77,2 36,7 à 38,6 113,9 à 115,8

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